En septembre 2002, la Small Business Administration (la SBA est l’agence fédérale américaine en charge des aides aux petites entreprises. Elle intervient notamment dans le cadre de leur financement ou pour garantir leurs emprunts) publie une étude indépendante montrant que les entreprises franchisées remboursent plus difficilement leurs emprunts que les entreprises isolées. Les résultats de cette étude vont avoir une incidence importante sur la communication de l’agence à destination des candidats à la franchise. On y lit notamment que « Compte tenu des publications contradictoires déjà parues et des résultats de la présente étude, on peut affirmer que les franchisés ne réussissent pas systématiquement beaucoup mieux que les entrepreneurs indépendants. En tant que source d’informations de référence, la SBA a le devoir de ne pas entretenir à tort les faux espoirs des futurs entrepreneurs et d’influencer la décision des prêteurs. »
Voici une traduction de l’executive summary de cette étude.
Les entreprises franchisées ont plus de difficultés à rembourser leurs emprunts que les entreprises isolées
Contexte
La franchise représente plus d’un tiers du commerce de détail. Certaines études ont entretenu l’idée selon laquelle devenir franchisé assurait de plus grandes chances de réussite que de créer une entreprise indépendante. D’autres études infirment cette conclusion.
La Small Business Administration (SBA) soutient publiquement l’idée selon laquelle les entreprises franchisées réussissent mieux que les entreprises indépendantes.
Si les entreprises franchisées sont effectivement « plus sûres » alors le pourcentage de prêts (garantis par la SBA) non remboursés par les franchisés devrait être sensiblement inférieur au pourcentage de prêts (garantis par la SBA) non remboursés par les entrepreneurs indépendants.
En dépit de l’image de réussite qui est associée à la création d’entreprise en franchise, l’Office of Inspector General (OIG) a décelé des problèmes potentiels dans les conditions d’octroi de certains prêts identifiés par la SBA comme étant des prêts franchisés. De plus, une étude financée par la SBA a mis en évidence que pour pouvoir baisser ses coûts en faisant jouer l’effet d’échelle, un franchiseur doit recruter suffisamment de franchisés pour atteindre une taille critique. Ainsi, les franchiseurs sont incités à encourager un maximum d’entrepreneurs à devenir franchisés, y compris ceux qui, compte tenu de leur profil, ne devraient pas être retenus. Car ces derniers sont autant susceptibles que les autres d’obtenir des prêts garantis par la SBA.
Sujets traités
Cette investigation a pour objet d’étudier :
(1) le risque potentiel auquel est exposé le portefeuille de prêts accordés aux entreprises franchisées,
(2) si le pourcentage de prêts franchisés non remboursés est significativement inférieur au pourcentage de prêts non remboursés accordés aux entreprises indépendantes,
(3) si certains prêteurs enregistrent un montant de prêts défaillants important par rapport aux sommes prêtées,
(4) si ces prêteurs auraient pu prendre des précautions au cours du montage des prêts pour éviter d’avoir à faire jouer la garantie.
Méthodologie et périmètre de l’étude
L’équipe chargée de l’inspection a étudié 423 393 prêts franchisés contractés entre les années fiscales 1991 et 2000. Les prêts ont été divisés en deux catégories, les prêts récemment contractés et les prêts anciens.
L’équipe a identifié les deux prêteurs qui avaient, proportionnellement au montant total prêté, les montants de prêts franchisés et non franchisés non remboursés les plus importants.
Un échantillon test réunissant les crédits non remboursés les plus importants accordés par ces prêteurs a été soumis à un examen qualitatif approfondi afin d’identifier d’éventuelles faiblesses dans l’étude des dossiers L’équipe a analysé les fichiers de prêts des prêteurs et des bureaux régionaux pour déterminer quels critères étaient pris en compte à la mise en place des prêts. Elle a également interrogé les fonctionnaires de la SBA.
Résultats
Il existe en franchise une opinion très largement répandue qui veut que les franchisés réussissent beaucoup mieux que les entrepreneurs indépendants. La SBA, compte tenu de son expérience en matière de prêts non remboursés, ne cautionne pas cette opinion. Par exemple, les prêts identifiés par la SBA comme étant des prêts franchisés contractés entre les années fiscales 1991 et 2000 sont, en quantité, légèrement moins remboursés que les prêts accordés aux entrepreneurs indépendants. Par contre, en termes de montant, ils sont seulement un peu mieux remboursés. De plus, le pourcentage des prêts franchisés non remboursés accordés par la Small Business Lending Companies (SBLCs) était sensiblement plus élevé que le pourcentage des prêts franchisés non remboursés accordés par les autres prêteurs. Les deux prêteurs mentionnés précédemment faisaient partie du groupe SBLCs.
En outre, les prêts accordés aux franchisés portent sur des montants plus importants que les prêts accordés aux entrepreneurs indépendants. De ce fait, l’exposition au risque est accrue. En 2000, le montant moyen des prêts contractés par des franchisés était supérieur de 40% au montant moyen des prêts accordés aux entrepreneurs indépendants. En 1991, ce chiffre n’était que de 1 %.
Compte tenu des publications contradictoires déjà parues et des résultats de la présente étude, on peut affirmer que les franchisés ne réussissent pas systématiquement beaucoup mieux que les entrepreneurs indépendants. En tant que source d’informations reconnue, la SBA a le devoir de ne pas entretenir à tort les faux espoirs des futurs entrepreneurs et d’influencer la décision des prêteurs.
Recommandation 1/2 : Afin de fournir aux futurs entrepreneurs et aux prêteurs des informations précises, l’Office of Financial Assistance (OFA), en accord avec l’Office of Entrepreneurial Development, doit s’assurer que désormais plus aucun document (imprimé ou électronique) publié par l’Agence n’affirmera que les franchisés réussissent beaucoup mieux que les entrepreneurs indépendants.
Les données de la SBA relatives aux prêts franchisés ne sont pas claires
Les responsables d’agence ont fait part de leurs inquiétudes à propos du contrôle que les franchiseurs peuvent exercer sur leurs franchisés. Afin de pouvoir évaluer correctement la situation, il est nécessaire d’identifier les prêts accordés à des entreprises dans lesquelles le chef d’entreprise n’est pas totalement libre de ces décisions. Mais les bases de données de la SBA identifient de manière incorrecte certains prêts. Par exemple, les prêts associés à une importante chaîne d’hôtel ne sont pas considérés comme étant des prêts franchisés mais sont assimilés à des prêts accordés aux membres d’une organisation à but non lucratif.
Une telle incohérence résulte :
– du manque de précision dans la définition de ce qu’est une franchise,
– de la dépendance du centre de traitement qui attend du prêteur qu’il décide si un prêt est ou non un prêt franchisé,
– de la confusion possible entre entreprises franchisées et entreprises liées par divers accords de licence.
Le paradoxe est que, malgré leur imprécision, les bases de données SBA sont fonctionnellement exploitables. La problématique relative au contrôle des petites entreprises s’applique à n’importe quelle petite entreprise dès lors que celle-ci exploite une marque détenue par une grande société.
Pour remédier à cette situation, la SBA a plusieurs options. Quelle que soit la méthode retenue, l’Agence a besoin d’élaborer des définitions cohérentes sur lesquelles les services opérationnels et les prêteurs pourront s’appuyer.
Recommandation 2/2 : Pour améliorer la précision et l’utilité de ses données, l’Office of Financial Assistance devrait : (1) définir clairement ce qui constitue soit un prêt franchisé soit, de manière plus générale, un prêt à une petite entreprise qui utilise la marque d’une plus grande société, (2) communiquer ces définitions au moyen d’une circulaire destinée aux services opérationnels de la SBA et aux prêteurs, (3) utiliser ces définitions pour reclasser les données dans les bases de données de prêts.
Les résultats d’études de Cas
Douze prêts non remboursés ont fait l’objet d’analyses approfondies. On a ainsi mis en évidence, que pour la plupart d’entre eux, plusieurs éléments (comme la faiblesse du patrimoine, une expérience limitée du management, une présence insuffisante sur le lieu d’activité, un mauvais emplacement) auraient dû attirer l’attention au moment de l’analyse du dossier. Les carences dans l’analyse du risque ne peuvent pas être imputées au seul parti pris des prêteurs de favoriser les prêts aux entreprises franchisées.
Commentaires de la SBA
L’Administrateur Associé de l’Office of Financial Assistance entérine les conclusions et les recommandations de ce rapport.