Je vous propose de découvrir la tribune publiée par Paul Wilbur, directeur des opérations de Frandata, dans le magazine Franchise Update, le magazine de référence des responsables de réseaux de franchise aux Etats-Unis.
De la présentation des points de vente du réseau aux antécédents judiciaires des dirigeants de la tête de réseau en passant par les faillites auxquelles ont été associées ces dirigeants, autant de sujets sur lesquels les franchiseurs américains sont tenus de communiquer de manière relativement détaillée, mais sur lesquels les franchiseurs français n’ont que peu d’obligation d’information (présentation des points de vente du réseau) voire aucune obligation (antécédents judiciaires des dirigeants de la tête de réseau et faillites auxquelles ont été associées ces dirigeants). Il suffit pour s’en rendre compte de comparer les réglementations américaine et française sur le sujet. (consulter l’information pré-contractuelle obligatoire en France et l’information pré-contractuelle obligatoire aux Etats-Unis).
Par ailleurs et comme on pourra le constater dans les prochains articles publiés sur ce site, le pragmatisme et la liberté d’expression qui ont cours outre-atlantique font que les candidats à la franchise bénéficient d’informations contradictoires et pédagogiques qui n’existent pas en France avec en particulier :
- la publication annuelle par un organisme fédéral, la Small Business Administration, des taux d’échecs des réseaux de franchise,
- des médias de renom qui décrivent la réalité du secteur sans aucun parti pris comme le Wall Street Journal, CNNmoney ou CNBC,
- des études indépendantes sur la franchise.
Cependant, malgré l’avance des Etats-Unis en matière de transparence, de nombreux spécialistes américains considèrent qu’il faut aller encore plus loin. Ainsi, de nombreuses voix s’élèvent dans le pays pour réclamer davantage de transparence. C’est l’une de ces voix, en l’occurrence celle de Paul Wilbur, que je vous propose de découvrir au travers de la tribune qu’il a publiée l’automne dernier dans Franchise Update. Bonne lecture !
Consulter l’article original : http://bit.ly/1xrptFy – page 54 (saisir 56 pour afficher la page de l’article)
Source : Franchise Update ISSUE III, 2014
Auteur : Paul Wilbur, directeur des opérations chez Frandata
Le temps de la transparence est venu
Les candidats à la franchise réclament une information précontractuelle de meilleure qualité.
Les candidats à la franchise s’interrogent sur de nombreux sujets avant de signer leur contrat : « Comment devient-on franchisé ? Pourrais-je créer plusieurs points de vente ? Sur quel territoire vais-je m’installer ? Combien coûte l’installation en franchise ? Quelles sont les redevances à payer ? Que dois-je attendre du franchiseur en termes de formation et d’assistance ? »
Autant de questions auxquelles les franchiseurs sont habitués à répondre, leurs réponses étant par ailleurs reprises dans les documents d’information précontractuelle lorsque ceux-ci sont conformes à la réglementation. Mais ces questions ne sont pas les plus importantes. En effet, les futurs franchisés se posent d’autres questions bien plus cruciales : « Combien puis-je raisonnablement espérer gagner ? » ou « Quel est le risque que je perde mon investissement ? ».
Force est de constater que les franchiseurs ont tendance à éluder ces questions-là et trouvent de nombreuses raisons de ne pas y répondre. Cette situation est inacceptable ! Il est urgent de faire évoluer la réglementation pour obliger les têtes de réseau à informer leurs futurs partenaires sur ces points précis. Trois faits montrent clairement que les choses vont dans ce sens et que le business model de la franchise évolue vers davantage de transparence.
Tout d’abord, la prise en compte par les banques de nouveaux indicateurs. En effet, une des conséquences majeures de la crise financière sur le secteur de la franchise a été pour les banques, de prendre davantage de précautions avant d’accorder des prêts aux futurs franchisés. Désormais, non seulement elles exigent davantage d’informations sur le futur franchisé mais aussi sur le franchiseur au travers de deux nouveaux indicateurs : « le taux de continuité » et « le revenu d’autosuffisance ». Ces termes, spécifiques à la franchise, n’existaient pas avant 2008. Depuis, les banquiers s’y réfèrent régulièrement dans un souci d’efficacité.
Ensuite, les nombreuses tentatives du législateur d’intervenir dans les relations franchiseurs/franchisés au cours de ces dernières années. Au cœur de ce débat se trouve le contrat de franchise et en particulier, les clauses qui le constituent. A partir de quand ces clauses nuisent-elles à la profitabilité d’une entreprise franchisée ? Je doute que le pouvoir réglementaire, qu’il soit local ou national, soit capable de répondre correctement à cette question. Je pense que si le marché pouvait régler ce problème en incitant à davantage de transparence, le législateur subirait moins de pression pour trouver des solutions qui, très probablement, auraient des conséquences non désirées sur le secteur. L’IFA a fait un pas décisif dans ce sens en publiant la Déclaration des Principes Fondamentaux de la Franchise. Un premier pas qui en annonce un autre, celui de la publication imminente des normes de rendement des réseaux de franchise.
Enfin, la multiplication des classements des « meilleurs » réseaux de franchise. Si beaucoup de ces classements cherchent surtout à faire parler d’eux, d’autres sont plus sérieux. L’exemple le plus remarquable de classement objectif a été le classement des meilleurs et des pires réseaux de franchise publié récemment par le magazine Forbes. Frandata a élaboré les critères qui ont permis de mesurer les performances des réseaux dont il est question dans cet article.
Dans les classements que nous réalisons, nous évaluons plusieurs indicateurs de performance tels que la demande pour le produit/service, le nombre de points de vente qui réussissent dans la durée, l’assistance financière, marketing et opérationnelle du franchiseur aux franchisés. Nous prenons en compte plusieurs facteurs et de nombreuses informations sur la franchise.
Nous avons constaté qu’un élément récurrent prenait le pas sur tous les autres, à savoir la volonté du franchiseur de fournir suffisamment d’informations aux candidats pour leur permettre d’évaluer les performances de son concept. Si l’article de Forbes ne met en lumière que 30 enseignes méritantes, il y en a des centaines d’autres qui sont tout aussi méritantes et qui s’attachent à fournir les informations permettant de mesurer leurs performances. Pour ce qui est des enseignes moins bien classées, certaines nous ont fourni les informations permettant de constater leurs moindres performances. Mais la majorité d’entre elles manquaient manifestement de transparence. C’est ce manque de transparence qui doit alerter les futurs franchisés. Sans cette transparence, comment savoir ce que l’on peut gagner ? Comment évaluer le risque d’échouer ? Comment un franchiseur qui dissimule certaines informations et dont le réseau a perdu de nombreux points de vente peut-il être crédible aux yeux d’un investisseur qui cherche à savoir ce qui se passe dans ce réseau ?
Dans quelques temps, les franchiseurs seront obligés de fournir aux futurs franchisés les informations, au-delà de celles que doit déjà contenir le FDD(*), indispensables pour évaluer les performances de leur réseau et de la tête de réseau. Par exemple, dans le cadre du classement que nous avons réalisé pour le magazine Forbes, une partie de notre analyse a porté sur la présence ou non du FPR(**). Les franchiseurs ne sont pas obligés de fournir ces éléments financiers. De fait, 60% de ceux que nous avons analysés les fournissaient, les autres 40% ne les communiquaient pas. Quels enseignements peut-on tirer de la volonté de ces franchiseurs de ne pas divulguer ces informations ? Probablement qu’ils ne les connaissent pas ou qu’ils veulent les cacher aux candidats à la franchise qui s’intéressent à leur enseigne. Quelle que soit l’explication, elle doit forcément conduire à se méfier de ces franchiseurs.
La transparence de l’information n’est pas seulement nécessaire aux candidats à la franchise. Elle est aussi utile aux prêteurs qui attendent des candidats qu’ils leur fournissent un business plan. Mais quel crédit accorder à un budget prévisionnel élaboré par une personne qui ne connaît pas le métier et à qui le franchiseur n’a fourni aucune information sur les performances financières de ces unités ? Les prêteurs savent que ces informations existent mais que la FTC Rule (***) n’impose pas aux franchiseurs de les divulguer. Aussi, la demandent-ils de plus en plus fréquemment. Un franchiseur qui communique sans rechigner ce type d’information aux prêteurs est appelé « lender friendly ».
Dans un futur très proche, la première question que les candidats à la franchise se poseront avant de signer leur contrat sera : est-ce que le franchiseur m’a fourni suffisamment d’informations pour que je m’engage en toute connaissance de cause ? De fait, le marché est en train de générer des bouleversements qui permettront aux futurs franchisés de se déterminer en fonction d’un éventail de critères significatifs de performance.
En tant que directeur des opérations de Frandata, Paul Wilbur s’occupe de la gestion courante des activités opérationnelles et est membre de la direction générale depuis plus de 10 ans. Il a occupé des postes techniques et marketing chez IBM, Digex et Communities in Schools. Vous pouvez le contacter au 703-740-4700 ou à l’adresse pwillbur@frandata.com
(*) Le « Franchise Disclosure Document » ou FDD est le nom du document d’information pré-contractuelle aux Etats-Unis.
(**) Le FDD est composé de 23 rubriques. FPR, pour« Financial Performance Representations », est l’intitulé de la rubrique 19. Dans cette rubrique, les franchiseurs peuvent, s’ils le souhaitent et sous certaines conditions, faire figurer des éléments financiers permettant à l’investisseur d’apprécier les performances financières de leur concept.
(***) FTC Rule : réglementation américaine encadrant l’information pré-contractuelle.